L’avenir de la planète est encore une énième fois en débat, mais cette fois-ci en terre africaine. La COP 27 de Charm el-Cheikh, en Egypte, ouverte depuis le 6 novembre et ce jusqu’au 18 courant, est encore dite «Sommet sur le climat de la dernière chance», pour sauver ce qu’il reste de la dégradation continue de l’environnement mondial, du fait de l’action de l’Homme. Interpellé par France Info, hier lundi, jour de démarrage des choses sérieuses, le président sénégalais, Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine (UA), forte de 55 Etats, qui subit de plein fouet l’impact des changements climatiques alors qu’elle n’est responsable que de 4% des émissions de gaz à effet de serre, a livré les attentes du continent.
«Cette Cop vient à un moment où le contient, après avoir contribué ardemment à la réussite de la Conférence de Paris sur le climat, avec l’accord qui a été obtenu et l’engagement des pays développés qui sont pour l’essentiel responsables de la pollution sur la planète mais sont surtout les responsables des émission, un engagement a été fait pour soutenir les pays en développement afin de financer leur adaptation, pour empêcher à ces pays qui aspirent également au développement de ne pas emprunter les mêmes voies que les pays industrialisés. Pour cela bien entendu, nous avons constaté que les rendez-vous n’ont pas été respectés, malgré quelques efforts.» C’est le président Macky Sall, président en exercice de l’Union africaine (UA) qui explique ainsi en quoi la 27e Conférence des Etats Parties à la Convention-cadre des Nations Unies sur les Changements climatiques (COP 27), réunissant, du 6 au 18 novembre 2022, plus de 100 chefs d’État ou de gouvernement du monde à Charm el-Cheikh (Egypte) est important pour le continent. Interrogé par Franc Info, Macky Sall a déploré que «depuis 2020, la communauté s’était engagée à mettre 100 milliards de dollars par ans et on n’y est pas. On n’a pas encore les 100 milliards, alors que l’Afrique à elle seule, je ne parle pas des autres pays en développement, a un besoin estimé à 85 milliards de dollars par an d’ici 2030, pour pouvoir respecter les objectifs de réduction de la température de la planète à 1,5° (degré). C’est dire au le moment est venu de mettre sur la table la responsabilité de chacun, qu’on ait une conscience collective mondiale sur le fait que soit nous sauvons ensemble la planète, soit elle disparait avec nous».
«Nous sommes obligés de nous endetter pour nous adapter, pour être dans des économies sobres en carbone ; cela n’est pas acceptable»
Répondant à la question si les fortes températures enregistrées en Europe cet été et que certains comparent à celle de l’Afrique vont contribuer à une prise de conscience dans les pays riches, il déclare : «je l’espère puisque finalement on se rend compte que nul n’est à l’abri du changement climatique. L’Europe a des températures supérieures parfois à celles de l’Afrique ; que demain l’Afrique ait des températures beaucoup plus basses que celles de l’Europe, c’est aujourd’hui dans l’ordre normal des choses. On voit aujourd’hui des cyclones, les tempêtes tropicales au rythme où elles arrivent, on n’a jamais connu cette accélération, ce cataclysme qui est en train d’engloutir le monde. Donc il est temps que tout le monde soit conscient, il faut une solidarité internationale». Et Macky Sall d’enfiler sa robe de défenseur de l’Afrique. «Vous savez, nous nous supportons le coût du développement des projets verts en Afrique, en recourant à la dette. Nous sommes obligés de nous endetter pour nous adapter, pour être dans des économies sobres en carbone. Cela n’est pas acceptable. Alors que nous aurions pu aller vers les solutions comme le charbon, ce qui aujourd’hui est en cours dans la plupart des pays industrialisés. Depuis la guerre en Ukraine, nous aurions pu et nous devrons, si l’argent n’est pas là, nous allons recourir aux mêmes sources énergétiques pour les aspirations au développement de l’Afrique». Pour justifier cette option, il dira : «nous avons plus de 600 millions d’Africains qui n’ont pas encore accès à l’électricité. Allez dire à ces populations : «attendez que la transition énergétique soit faite». Donc il y a une prise de conscience et une responsabilité à assumer. Et j’espère que nous aurons véritablement, à l’occasion de cette COP africaine, qui se tient en Afrique, tout au moins la 27e, des réponses plus positives».
«Les mécanismes des pertes et dommages» pour pousserles pays riches à verser chaque année des centaines de milliards de dollars aux pays en développement
Avec 1 milliards 200 millions d’habitants, soit environ 1 terrien sur 7, l’Afrique représente 4% des émissions de gaz à effet de serre sur l’ensemble de la planète. D’où l’idée d’un mécanisme qui sera débattu lors de cette COP, appelé «le Mécanismes des pertes et dommages». Il s’agit pour les pays riches de verser chaque année des centaines et des centaines de milliards de dollars aux pays en voie de développement pour les aider à faire face au réchauffement, aux inondations, aux ouragans. Réagissant à cette question qui a donc été ajoutée in extrémiste à l’agenda du sommet, alors que, depuis des années, les pays riches ont pied sur le front sur cette demande, le président de l’UA reste comme sceptique. «Je ne sais pas si on va les convaincre, cette fois-ci. Mais je crois que si rien n’est fait, nous sortirons de Charm el-Cheikh avec un goût d’inachevé. Et le risque que je vois tout de suite c’est que les gens vont retourner chacun avec ses solutions nationales qui consisteront à se développer par tous les moyens, quoique cela puisse en coûter à la planète. C’est le risque. C’est pourquoi, et je pense, il y a un effort à faire non seulement au niveau des Etats, mais également au niveau des entreprises qui sont principalement les plus grandes pollueuses. Et, à ce niveau, moi je réclame simplement une prise de conscience collective». Toutefois, fait-il reconnaître, «les Africains font des efforts». A titre d’exemple, «au Sénégal nous avons 31% de notre électricité qui vient par des sources renouvelables. Nous nous sommes endettés également pour faire des trains électriques, des bus électriques. Mais tout cela à un coût. Mais je dois dire quand-même qu’il y a des pays, européens pour la plupart, et la fondation Gate qui, dans le cadre de l’accélération du financement de l’accélération du programme d’adaptation de l’Afrique, ont pu mobiliser 90 millions de dollars américain ; je pense qu’on va arriver à 100 millions aujourd’hui, afin d’utiliser l’effet levier et lever 10 milliards de dollars sur l’accélération du financement de l’adaptation. C’est un exemple qu’il faut quand-même saluer, c’est une goutte d’eau, mais il faut encourager les pays qui se sont engagés au moins, qui se sentent concernés. Mais c’est beaucoup trop peu par rapport à nos attentes», insiste-il. Surtout que si rien n’est fait aussi les déplacements de populations vont s’accentuer, y compris les migrations irrégulières.
«Tout a été dit sur l’état d’urgence climatique…plus que jamais, il faut agir pour sauver la planète, par…»
Par ailleurs, dans son discours à l’ouverture du sommet, il a assuré l’Afrique qui contribue «pour moins de 4% des émissions de gaz à effets de serre» est disposée «à travailler avec tous les partenaires pour que la COP de Sharm el-Cheikh ne soit pas un constat de plus sur le péril climatique, mais une action de plus en faveur du climat, dans l’intérêt des générations actuelles et futures. Et Maky Sall d’ajouter, «au nom de l’Afrique», que «tout a été dit sur l’état d’urgence climatique». «Les études scientifiques ont alerté plus d’une fois ; et nous vivons au quotidien les manifestations extrêmes du dérèglement climatique. Plus que jamais, il faut agir pour sauver la planète, par la mise en œuvre de l’Accord de Paris sur le climat», a-t-il insisté dans son discours dont copie a été transmise à l’APS.